Journal "La Montagne" 15 Novembre 2019 (édition d'Issoire)
Publié le 15/11/2019
Qu'est-ce qui a bien pu pousser Henri Kloeckner à créer son atelier de moquettes dans un petit hameau à trois kilomètres du bourg de Bagnols ? « Mon frère habite ici depuis une dizaine d'années. Il a mis à ma disposition un hangar que j'ai aménagé pour en faire mon deuxième atelier. J'en ai déjà un d'environ 20m² à Clermont-Ferrand, trop petit pour stocker mes rouleaux de moquette et pouvoir fabriquer les plus grosses pièces ».
Péripétie.Lorsque l'on pénètre dans son atelier bagnolais, le regard est porté instinctivement sur ce gigantesque présentoir électrique de 5m de haut qui peut recevoir jusqu'à 21 rouleaux de moquette d'environ 150 kg chacun. Des rouleaux que cet artisan a eu bien du mal à se faire livrer jusqu'à son entrepôt. « Quand je me suis installé ici il y a 7 ans, les transporteurs ne voulaient pas monter jusque chez moi. Il faut dire qu'en plus d'être étroite et sinueuse, la route n'était pas accessible pour les camions jusqu'aux portes de l'atelier » reconnaît-il.
Cette péripétie n'est pas la seule qui s'est dressée sur son chemin. Sans parler du dernier fabricant de moquette en France, dans le Berry, à qui il a toujours été fidèle, Henri Kloeckner a dû faire montre de beaucoup d'ingéniosité pour arriver à faire des tapis sur mesure.
À l'exception des deux machines qu'il a fait venir spécialement d'Asie pour border la moquette afin d'en faire un tapis, tout le reste a été conçu par lui.
Comme cette table avec des trous dans lesquels une turbine envoie de l'air pour faire glisser les plus grands tapis sans effort. Ou encore « ce treuil maison » qui lui permet de faire monter et descendre les rouleaux au-dessus de son plan de travail.
Rien ne résiste à l'imagination de ce « Géo bricole tout » qui a dû apprendre à composer pour faire face aux aléas de sa santé : « J'ai une fibromyalgie (maladie musculaire) qui me limite dans certains mouvements. Et avec l'âge cela ne va pas en s'arrangeant », avoue-t-il. « J'ai quand même 73 ans ! Mais depuis que je me suis spécialisé dans la moquette surjetée en 2012, j'ai l'impression de revivre ».
Son père déjà faisait dans le revêtement de sol. « Je me suis formé à ses côtés et puis en autodidacte, j'ai appris d'autres techniques jusqu'à me particulariser dans le tapis sur mesure. Je suis l'un des derniers en France à pouvoir faire ce travail qui réclame force et doigté ». Et de conclure, « j'aimerais bien que mon activité perdure après moi. Mais il n'y a pas beaucoup de candidats ».
Le savoir-faire unique d'Henri Kloeckner lui a permis de se faire, de fil en aiguille, une bonne petite réputation en
Auvergne et dans tout l'hexagone.
Ses clients sont à 90 % des privés dont les 2\3 sont des propriétaires de camping-cars. « Mais j'ai aussi refait entièrement les revêtements de sol d'un grand yacht ou encore d'un avion
privé. Je conçois moi-même mes gabarits et je suis capable de reproduire n'importe quel motif stylisé ou en relief. Plus c'est compliqué, plus j'aime ça ».
Pour s'amuser, il vient « de terminer le Bibendum, réplique exacte de l'étendard Michelin que je compte bien leur
présenter ».
En attendant, qui sait, de persuader la manufacture d'en faire l'acquisition, Henri Kloeckner a encore quelques jolis challenges à relever.
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